L'île de Gorée fut l'une des principales têtes
de pont de l'esclavage en Afrique.
Le commerce triangulaire
Partis
de Lisbonne, Bordeaux ou Nantes, les navires longeaient les côtes
africaines et échangeaient leur pacotille contre des esclaves.
Si des blancs ou des métis servirent d'intermédiaires avec
les marchands, ce furent les chefs africains qui se livrèrent à
la chasse aux esclaves. Ces derniers étaient en général
des prisonniers de guerre.
Les futurs esclaves étaient ensuite transférés
après inspection de leur état de santé dans des ports
de transit dont Gorée est l'archétype. La maison des esclaves
servaient à enfermer les prisonniers avant que l'on vienne les chercher.
S'ils étaient trop maigres, on les faisait engraisser, on les «
blanchissait », afin d'améliorer leur valeur marchande.
Les cales pleines, les navires négriers mettaient le cap sur
les Amériques. Jusqu'à six cent esclaves pouvaient s'entasser
dans les soutes. La journée, seuls les femmes et les enfants avaient
le droit de sortir. De temps en temps, on les arrosait et les faisait danser
pour les maintenir en vie.
Après plusieurs mois de voyage pénible, les esclaves etaient
vendus et remplacés dans les cales par du sucre et autres produits
tropicaux. Dix-huit mois plus tard, les navires étaient de retour
en Europe. Dans ce commerce triangulaire, les armateurs réalisaient
de très solides bénéfices.
L'abolition de l'esclavage
En France, l'esclavage fut aboli par la Révolution française
en 1794 mais fut rétablie par l'Empire en 1802. En 1833, l'Angleterre
fut la première à émanciper ses esclaves. Il faudra
attendre 1848, pour que la France de Victor Scholcher suive son exemple.
La
traite négrière atlantique constitue un événement
fondamental de l'histoire du continent africain. Au cours de ces trois
siècles de traite intensive (de 1550 à 1850) on estime que
20 à 100 millions d'Africains furent déportés, sachant
que 65% à 80% d'entre eux mourraient à un moment ou à
un autre de leur calvaire. Les conséquences démographiques
pour l'Afrique furent donc aigues, la traite ayant interrompu la croissance
démographique pendant deux siècles.
Pourtant, au-delà de cette saignée démographique,
des bouleversement politiques qu'entraina les guerres aux esclaves, il
est essentiel de se souvenir que les Africains lui survécurent en
maintenant largement leur culture et leurs institutions. Pour reprendre
les termes de John Iliffe : « Paradoxalement, cette période
honteuse montra également la résistance humaine sous ces
aspects les plus courageux. La splendeur de l'Afrique était aussi
dans sa souffrance. » |