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L’amour
de l’Afrique
par
Ernest
Hemingway |
Retourner
en Afrique
«
Tout ce que je désirais maintenant, c’était de retourner
en Afrique. Nous ne l’avions pas quittée, encore, mais quand je
m’éveillais, la nuit, je restais allongé, à l’écoute,
la regrettant déjà. Maintenant, regardant le tunnel d’arbres
au-dessus du ravin, le ciel avec des nuages blancs poussés par le
vent, j’aimais tant ce pays que j’étais heureux comme vous l’êtes
quand vous venez d’être avec une femme que vous aimez vraiment, quand,
épuisé, vous sentez ce qui naît encore en vous et c’est
là et vous ne pourrez jamais l’avoir tout et pourtant ce qu’il y
a, en ce moment, vous pouvez l’avoir et vous en voulez toujours plus, pour
l’avoir et être et vivre dedans, pour le posséder de nouveau
et pour toujours, pour ce long toujours, si soudainement terminé;
rendant le temps immobile qu’ensuite vous attendez de l’entendre repartir,
et il est long à se remettre en marche.
Mais
vous n’êtes pas seul, car, si vous l’avez jamais vraiment aimée,
heureuse et sans rien de tragique, elle vous aime toujours; qui que ce
soit qu’elle aime et où qu’elle aille, elle vous aime davantage.
Et si vous avez aimé une femme et un pays, vous êtes très
favorisé et si vous mourrez ensuite, c’est sans importance. Maintenant,
étant en Afrique, je désirais ardemment en avoir d’avantage,
les changements de saisons, les pluies sans l’obligation de voyager, les
petits désagréments, rançon de cette réalité,
le nom de ses arbres, de ses petits animaux et de tous ses oiseaux, connaître
son langage et avoir le temps d’y rester et de se déplacer sans
hâte. J’avais aimé la nature toute ma vie; la nature valait
mieux que les gens. Je ne pouvais aimer que très peu de gens à
la fois. »
Se
sentir chez soi
«
J’adorais ce pays et je m’y sentais chez moi et, quand un homme se sent
chez lui en dehors de l’endroit où il est né, c’est là
qu’il est destiné à aller. (…) Je reviendrais en Afrique
mais pas pour y gagner ma vie. Je peux faire cela avec deux crayons et
quelques centaines de pages du papier le meilleur marché. Mais je
reviendrai là où il me plaisait de vivre ; de vivre vraiment.
Pas de laisser simplement ma vie s’écouler. (…) Je savais reconnaître
un bon pays quand j’en voyais un. Ici il y avait du gibier, beaucoup d’oiseaux,
et j’aimais les indigènes. Ici je pouvais chasser et pêcher.
Ca, et écrire, et lire, et voir des tableaux était tout ce
que j’aimais faire. »
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